Après la traversée du détroit de Messine, j’arrive en Calabre. Il reste 24km pour arriver au camping du soir. Il faut chaud, je prends le temps de me baigner.

J’arrive à destination après trois heures de montée. Oui, oui, trois heures ! La vache ! Ça grimpe ! 1200m de dénivelé positif sur 24 kilomètres ! Le plus dur c’est d’arriver à San Stefano en Aspromonte en pensant être arrivé et de me rendre compte que le camping est à 7km. Bim ! Encore une heure !

Mais le paysage dans la montée est splendide. Je viens de changer de région, mais aussi de saison. De la forêt de feuillus, des boulots, des chênes pédonculés (toi-même !) encore en bourgeons, des fleurs sur les pommiers, des fleurs un peu partout. Ça sent la menthe fraîche, l’humus. Rien à voir avec l’ambiance des 3 dernières semaines au milieu des oliviers et orangers. Et à la vitesse où je roule j’ai le temps de profiter de ce nouveau décor.

J’arrive à destination frais comme un gardon qui aurait passé la journée sur la plage arrière d’une Fiat Panda. Un joli camping à la ferme avec une vue imprenable sur la montée que je viens de gravir (c’est vraiment le bon terme !). La dame me propose (en plus de me faire un jus d’oranges frais) de mettre ma tente sous l’auvent, de profiter de la salle commune ce soir pour être au chaud et de ne pas hésiter à prendre une couverture à disposition pour la nuit. Il fait un grand soleil, je suis en short et tee-shirt, j’avoue ne pas comprendre….

Vers 19h, j’ai comme une révélation. Il suffit que le soleil baisse sur l’horizon puis se couche. Je viens de perdre 15 degrés entre ma baignade ce midi et ma douche ce soir. Ça caille ! Grave ! Le camping est situé à 1000m d’altitude, ça se sent dans les mollets mais surtout dans la température de l’air. Finalement les couvertures en plus, c’est peut-être une bonne idée….

Je me réveille les pieds dans la rosée, le temps de faire sécher la tente, de faire un peu de couture, des étirements et me voilà sur ma bicyclette vers 10h. Ça monte encore un peu jusqu’au bled d’à côté où commence la CPC (Ciclovia Parchi Calabre) que je vais suivre pour les 400 prochains kilomètres à travers les parcs nationaux de Calabre (d’où le nom….)

Je me ravitaille, fais trois ou quatre kilomètres avant de me rendre compte que je prends la véloroute à l’envers et c’est parti ! Quelques kilomètres en haut du plateau dans le même décor forestier de la veille, une bonne longue descente à fond les ballons puis une bonne heure et demie de montée pour revenir au sommet (ou presque). J’enchaine les ratournettes sur une route d’à peine deux mètres de large, les cailloux et les épines de pins sont de bon augure pour la fréquentation automobile (zéro voiture par jour), des rochers pour pique-niquer, un autre à escalader pour trouver un trésor enfoui selon une légende calabraise, une cascade pour m’emerveiller, des oiseaux, du silence, que demander de plus ? Un lieu de bivouac plat, isolé, avec de l’herbe douce, de la menthe pour une infusion et un peu de réseau ? Bingo ! Cette journée est parfaite.

Après un magnifiques lever de soleil et le séchage de la tente, je reprends la route et croise un couple de jeunes suisses sur leurs bicyclettes. Ils sont en voyage depuis Palerme et se dirigent eux aussi vers Bari. Ils en ont un peu marre de prendre la pluie depuis leur départ mais ça va.

La pluie ? Quelle pluie ? J’en suis en tout est pour tout à 6h de vélo sous la pluie depuis le début de mon voyage. En Sicile j’ai presque souffert de la chaleur. Quel est ce mystère ? Un nuage de pluie accroché à leur porte-bagage ?

Le temps que trouver un mètre carré de réseau ils prennent de l’avance dans la montée, je finis par les rattraper, et nous faisons une pause casse-croûte ensemble et décidons de rouler tous les trois pour la journée.

David et Juliette sont d’adorables trentenaires et nous faisons connaissance en pédalant avec plaisir 

Assez vite, la théorie du petit nuage semble se confirmer. Il se met à pleuviner, puis il tombe des seaux. Il faut ressortir les habits de pluie qui n’avaient pas bougé des sacoches depuis Aubenas (le 18 mars !). Nous roulons sous la pluie deux heures, la route est sympa (et en descente !) mais nous sommes trempés. Vraiment trempés. Une évidence apparaît, il nous faut une chambre d’hôtel. Ça tombe bien, il y en a une à 500m pour 50 euros avec repas du soir et petit-déjeuner compris, on ne va pas se priver.

Après avoir pourri nos chambres avec nos sacoches dégoulinantes et imprégné l’air d’une odeur de chien mouillé en suspendant nos fringues un peu partout, nous passons une super soirée tous les trois à papoter de tout, de rien. Nous parlons des mécanismes en jeu lors de l’apprentissage des tables de multiplication chez les jeunes enfants (je vous jure que c’est vrai !), des bienfaits de l’anticapitalisme et du bracelet électronique de Sarkozy…. .Une magnifique rencontre ! Nous rions beaucoup aussi.

Je pense qu’on va passer quelques jours ensemble, découvrir encore la région de Calabre qui est magnifique et surtout mettre fin à la malédiction du nuage de pluie accroché au porte-bagage !

Ça va être chouette.

Je vous embrasse