Ce lundi, c’est mon 101eme jour de voyage. C’est dingue, non ? Pas que ça fasse le même nombre que de dalmatiens mais juste parce que ça fait déjà beaucoup, non ?
J’ai réussi à me mettre en route à 6h15. Je dois avouer que la chaleur écrasante de ces derniers jours m’inquiète un peu. Trois jours de forte chaleur mais trois jours canon à Athènes avec Mélanie et Maëlla. Pour faire court : retrouvailles, piste du stade olympique pour nous tout seul, nuit sur un toit, Acropole sous tous les angles de jour et de nuit, Cariatides émouvantes dans le soleil couchant, canal de Corinthe, cap Sounion, temple de Poséidon, baignades dans une eau magnifique, citadelle d’Acrocorinthe, balade dans les quartiers athénien, mont Lycabeth au coucher du soleil, parties de Hilo endiablées,… quatre jours sans vélo, quatre jours magnifiques, mais quatre jours intenses et chauds donc.
Je sors donc d’Athènes au lever du soleil. 15km à travers les quartiers résidentiels de la capitale. J’ai décidé de sortir par les hauteurs au nord de la ville. Au moment de passer le sommet de ces grosses collines je ne m’attends pas au paysage qui s’offre à moi : la zone industrielle sous un nuage de pollution jaunâtre, des ribambelles de camions poubelles sur une route entourée de déchets à l’abandon à moitié calcinés, tous ces camions allant décharger leurs contenus en haut d’une décharge de la taille d’une petite montagne. Juste un enfer ! Vite vite vite ! Trouver une autre route ! Il faut gravir les hauteurs plutôt que de prendre la plaine. Pas grave si ça grimpe ! Tout plutôt que de subir ça!

Ça monte, il fait chaud, mais la route est tranquille dans ces hauteurs. A 14h, il faut se rendre à l’évidence, il est temps de s’arrêter. Pendant ma pause, je papote avec un gars qui me suggère de m’installer dans le bled suivant où il y a une petite église ombragée idéale pour un bivouac. Let’s go ! L’endroit est idéal en effet, et les 5 chiens (je les déteste toujours autant) qui squattent le lieu sont assommés par la chaleur et m’ignorent (tout comme moi, mais avec un peu plus de méfiance) puis s’en vont.
Une petite sieste bien agréable sur les bancs et il est déjà l’heure de monter la tente pour commencer la nuit (19h !). Elle est vite interrompue par deux gars qui appellent depuis l’autre côté de la grille. Il me faut un moment pour comprendre que c’est à moi que s’adressent ces deux soixantenaires qui cherchent à savoir ce que je fais là. Leur niveau d’anglais les incite à aller chercher leurs femmes et nous voilà tous les 5 à taper la discute au milieu de ma nuit (il doit être 20h30 !). Mes nouveaux amis n’arrivent toujours pas à comprendre ce que je fais dans ce tout petit village perdu dans les montagnes. Quant au fait que ce soit à velo…

Cette veillée tardive (21h30) ne m’empêche pas de me réveiller à 4h30 pour un départ à 5h15. Il ne fait plus vraiment noir et le ciel qui s’éclaircit au fur et à mesure donne à ces premiers kilomètres de montée un aspect hors du commun. Et surtout, il fait doux ! Presque frais…
La fraîcheur ne résiste pas longtemps au soleil qui se lève ni au pourcentage de ces premiers kilomètres. Je suis à plus de 1000m d’altitude et ça grimpe encore. Mais la balade est magnifique. Paysage de montagne au milieu des sapins qui bourdonnent au sens propre, des centaines de ruches sont alignées tout au long de la route, je croise des dizaines d’escadrilles d’abeilles déjà au boulot.
Comme hier, à 13h il me faut vite de l’ombre pour une sieste urgente. Une balançoire à l’ombre dans un parc fera très bien l’affaire. Il me faut une grosse motivation pour me réveiller et me rendre dans un bar (à l’ombre) pour prendre ma dose de sucre. Des gars papotent entre eux et finissent par me demander d’où je viens, m’invitent à leur table et m’offrent un verre. Ils discutent longtemps pour comprendre eux-aussi ce que je fais là et se creusent la tête pour me proposer un endroit où dormir. Il y a bien un petit village sur la route, mais c’est à 15km et ma montée leur semble infranchissable.
Sur le papier (enfin sur l’Appli), ça semble jouable. Il est 17h, il fait moins chaud, je reprends la route.
Après 2 ou 3 km, j’ai comme un doute….. Le col que j’apercois tout là-haut me paraît très très loin, et surtout très très haut. Moi qui pensais que la journée allait être tranquille…. Je mets mes écouteurs pour trouver de la motivation et c’est parti !
Il me faut près de 2h pour faire les 12km avant de redescendre vers le village recommandé. Après 80km dans les jambes, ça pique. Mais ça passe quand même. Reste plus qu’à trouver de l’eau et un spot pour la nuit. Ce n’est pas la place qui manque !

Départ à nouveau dans la nuit. Direction Delphes. Le paysage est toujours aussi montagneux. Sur les plateaux les cultures remplacent les pins, sur les hauteurs la végétation a brûlé, il ne reste que des arbres calcinés. Le monastère Housios Loukas (Saint Luc !) que je visite sur la route a failli y passer. Ça aurait été dommage, cet endroit est juste incroyable avec ses deux églises collées l’une à l’autre, ses mosaïques et fresques byzantines, un chef d’œuvre !
Encore une dizaine de kilomètres de montée ( j’aurai fait plus de 4000 m de D+ en 3 jours) et surtout 10km de descente pour arriver au camping de Delphes. Facile de savoir qu’on approche du site archéologique, il y a des dizaines d’autocars garés tout le long de la route. Je me dépêche de rejoindre le camping (avec piscine) pour me poser, il y a comme une urgence. Je visiterai le site demain matin à l’ouverture.
Je n’ai pas vraiment décidé ce que je ferai demain après la visite. Un jour de repos ? Une petite journée pour avancer un peu ? une journée complète sous la chaleur ? On verra bien….
L’ouverture du site archéologique est à 8h. C’est donc grasse matinée jusqu’ à 6h45. Youhou ! Après une tête dans la piscine et un petit dej rapide, je suis le premier arrivé au guichet à 7h59. Je vais encore une fois avoir l’endroit pour moi tout seul ou presque (en fait on est 5). Je suis impatient, comme pour un premier rencard. C’est le lieu de résidence de la Pythie quand même ! Le centre du monde ! C’est là que Zeus a lancé un rocher (l’omphalos , « le nombril ») après avoir envoyé deux aigles d’or dans deux directions différentes pour déterminer le centre du monde là où ils se croiseraient. C’est là que Sybille a annoncé depuis son rocher au pied du temple d’apollon la chute de Troyes. Donc forcément, je suis impressionné….
Et effectivement, le site est incroyable. Le temple, le théâtre , le stade pour les jeux delphiques, les « offrandes » des villes , ces monuments de type coffres-forts où sont stockés tous les butins des différentes victoires des villes les unes sur les autres (Pas les femmes enlevées et violées, elles, elles sont emmenées, mariées et engrossées pour entrer dans les légendes mythologiques). Le tout a flanc de montagne face à un paysage somptueux. C’est incroyable !

Je reste là plus d’une heure à m’émerveiller, à imaginer ce que pouvait être l’endroit à l’époque, à entrevoir des futurs possibles…. J’ai demandé à la Pythie, elle m’a dit que la fin des inégalités, la justice sociale, la paix dans le monde et la condamnation de tous les politiques corrompus c’était pour bientôt. Je suis donc reparti du temple d’Apollon plein d’espoir et des paillettes plein les yeux.
Quand à mon futur proche, il m’est apparu aussi : je vais rester au bord de la piscine à ne rien faire si ce n’est vous raconter mes trois derniers jours. C’est le max que mon corps se sent capable de faire aujourd’hui .
Demain je reprends la route vers les Météores que je devrais atteindre dans 3 jours. Si les prédictions de l’oracle sont exactes….
Je vous embrasse.

Je suis scotché, ça à l’air tellement beau 🏛️
Aaaaaah merci la Pythie je suis complètement rassurée …. 😉
Waouhhh ! C’est vraiment magnifique… Attention aux coups de chaleur tout de même !! Des bisettes
Coucou Luc ,tu nous fais profiter de beaux paysages ,c’est vraiment magnifique. Grâce à tes écrits nous vivons ton aventure !
Un prof au top .
A bientôt je l’espère
Sabrina (b1 )